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26 décembre 2013 4 26 /12 /décembre /2013 18:04

Pimp my pride

 

http://www.xxlmag.com/wp-content/uploads/2013/06/Run-The-Jewels-Cover.jpg

[Killer Mike & El-P – run the jewels LP – 2013]

2012, sortie de R.A.P. Music, je découvre Killer Mike. 2013, je vois le gros bonhomme en concert, puis j’achète Run The Jewels, collaboration made in Detroit, officialisation de l’association (El-P avait produit l’album de Killer Mike l’an passé) du travail minutieux d’El-P (l’ex-Company Flow qui, pourtant, généralement m’ennuie) et du phrasé gangsta et vindicatif de ce MC. Confirmation d’une nouvelle valeur sûre d’un côté, surprise d’un autre, l’album pousse bien au-delà de mes attentes les promesses affichées. Déstructurée, littéralement expérimentale, chaotique, la prod’ d’El-P résonne pourtant d’une violence rare et sauvage. Sons synthétiques, électriques et électroniques se mélangent. En prenant constamment le micro, le producteur donne le change à Mike, pose le contraste avec son flow simple face au déferlement de mots du Killer. Ce dernier paraît plus à l’aise encore qu’il ne l’était sur R.A.P. Music, son débit impressionne, sa hargne est ravageuse, micro en main ce mec est intouchable. Sorti il y a quinze ans, Run The Jewels serait aujourd’hui considéré comme un classique. Loin  des classiques contemporains, il restera probablement cantonné au statut de magnifique garant d’un hip-hop quoiqu’on en dise underground et authentique. Nous, on connaîtra la vérité.

 

 

http://f0.bcbits.com/img/a2278760106_2.jpg[Ugly Heroes – s/t 2LP – 2013]

Apollo Brown propose des prods à l’opposé du taf de Rza, mais les propose au même rythme : cette année, la patte Apollo prend forme sous le nom Ugly Heroes, soit toujours cette base chaude et funky, absolument pas aventurière et constamment facile d’accès. Le talent d’Apollo a toujours été ce travail fédérateur, multi-générationnel et interculturel. Il est le hip-hop pour tous, accessible, confortable, poli et néanmoins richissime. J’en parle parce que c’est lui mais, faisons pour une fois preuve de bonne foi, Ugly Heroes déçoit : plus lisse que ses prédécesseurs, il n’est que rarement un réflexe pour ma platine. Une agréable confiserie.

 

 

http://medias.2kmusic.com/uploads/2013/08/08/img-1375992867-be4f4b77f8d52e94898aa5356b2c7049.jpg[A$AP Ferg – trap lord 2LP – 2013]

Lui, en revanche, surprend. Passée l’étape débilement jouissive d’une pochette huilée, pimpante et musclée, le premier album revêt un look de bad-boy terriblement malin. Je suis fou et vendeur, donc je propose la référence à Company Flow : urbain, sombre, bourré de détails, Trap Lord est un album pour bad-trips, un acide industriel qu’on recrache pour le faire tourner. C’est mon hip-hop de dépravés, mon coup de cœur de l’année, ma vision de la facette du rap qui vous promet l’enfer, l’esclavage, la dépravation, avec votre consentement. Méchant, glauque, complet.

 

http://medias.2kmusic.com/uploads/2013/02/19/img-1361289617-bd46884aff2b771304997e71488eaae7.jpg

[Ghostface Killah & Adrian Younge – 12 reasons to die LP – 2013]

Il s’est écoulé tant de temps depuis qu’un gars du Wu-Tang n’avait pas sorti un album à peu près solo de cette qualité que je ne saurai vous dire s’il date du XIème siècle ou du temps des transports sans sonnerie de portable. Tout ce qu’on pouvait attendre d’un tel nom, d’un tel titre et d’une telle association – dans le XXème siècle – prend forme ici (cet argument se suffit à lui-même). Pensé comme une bande originale de films de gangsters italiens des années 60, 12 Reasons To Die est en réalité un album aux ambiances certes cinématographiques mais surtout old-school, pas tellement proche d’une B.O et manifestement une belle complicité entre un producteur à l’accent soul et un féroce Ghostface, aux textes toujours bien perchés. On appréciera bien sûr de croiser RZA et Cappadonna parmi les pimpants figurants d’un disque aussi frais que mon dvd de Chinatown.

 

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[The Doppelgangaz – hark 2LP – 21013]

Lui, c’est l’objet classieux et précieux du hip-hop 2013, le disque fin, le projet énigmatique qui construit sur le boom-bap un hip-hop bourré de subtilités, une improbable association de beats en théorie incohérents, en définitive parfaitement sensée. Dans une ambiance toujours angoissante, sans appeler le moindre invité, le duo expérimente et multiplie les grands écarts, flirte avec le jazz, rappe avec conviction et humour, ne craint même pas l’apparition d’une flûte, bref donne tout son sens à l’anglicisme freestyle sans bafouer l’étymologie du mot rap. Pétard sur le gâteau, le second album, leur meilleur à ce jour, Lone Sharks, vient d’être réédité.

 

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[Jonwayne – rap album one 2LP - 2013]

Ce barbu blanc-bec rondouillard restera l'une des grandes découvertes de l’année, énième grand cru signé par Stones Throw. Une démonstration tellement bluffante et inattendue que je n’ai aucun angle d’attaque pour vous la vendre… je manque de références, de technique, de culture hip-hop, même alternative, pour pouvoir définir ce mec, son univers, sa manière de combiner les textures, de débiter ses mots, de rendre simplement étranges – voire d’en faire une empreinte digitale - des égarements que d’autres qualifieraient d’erreurs. Je ne sais pas si ce mec est un génie ayant tout pigé à 20 ans de bidouillages autour de hip-hop, ayant parfaitement enregistré sa rencontre avec Flying Lotus, ou juste un geek bidouilleur qui a eu un gros coup de bol ; ou les deux. Franchement, je crois que je m’en contrefous.

 

http://www.rap-n-blues.com/wp-content/uploads/2013/05/Kid-Tsunami-Catch-Wreck.jpg

[Kid Tsunami – the chase CD – 2013]

Lui débarque d’Australie, sort de l’école New-York, Pete Rock ou Dj Premier en directeurs de thèse. Comme Lewis Parker (voir ci-dessous), il pioche allègrement dans les cuivres et se réfère ouvertement aux années 90, ciblant sa dernière période. Notez plutôt les featurings : Sean Price, J Live, Jeru The Damaja, Pharoahe Monch, KRS-One, Kool G Rap, Prince Po ou O.C.. Basant ses sur un fond jazzy, Kid Tsu mêle guitares et délires bluesy. De cette association naissent l’originalité de The Chase et la reconnaissance du talent de l’Australien : Ces prod’ ciblent l’essentiel donc la fluidité, contournent pêché de prétention et excès de suffisance, choisissent avec bon sens le MC adapté. Discrètes mais puissantes, riches mais finement ficelées. On tient là un producteur d’avenir.

 

http://f0.bcbits.com/img/a3877284648_10.jpg

[Lewis Parker – the puzzle episode 2 : the glass ceiling 2CD – 2013]

 

Premier titre, premier sample, Lewis Parker plonge dans un cinéma seventies façon 007, pas étonnant pour un Anglais, dans une son soul/funk chaudement vintage et chaleureusement kitsch - la cover ne trompe pas -, une soul/funk douce et envoûtant – un concert de basse, saxo et cuivres qui berce. Dans cette ambiance cosy, les voix sorties des années 90 sont mises en exergue, dynamiques, catchy, relief nécessaire pour un équilibre optimal. Je n’irai pas plus en profondeur : deux disques – et il ne s’agit pas du classique CD instru -, 100 minutes de son donc une myriade de références et sonorités, The Glass Ceiling est une épopée dans l’époque sacrée du hip-hop. Il rend ainsi grâce à son histoire. 


 
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